À l’occasion de la sortie du nouveau RIP Mirage 3, nous avons voulu voir ce que la société Dinax était capable de proposer. Et comme le test d’un logiciel n’est jamais aussi intéressant que quand il oppose ce dernier à sa concurrence, nous avons décidé de comparer Mirage 3.1.1 à Fiery eXpress 4.5.5.
OS supportés
Les deux RIP fonctionnent tous les deux aussi bien sous Windows (de la version XP à la version 8.1) que sous Mac OS X.
Attention cependant pour l’OS marqué d’une pomme : un processeur Intel sera indispensable, sous 10.5.8 pour Mirage et sous 10.6.8 pour Fiery eXpress.
Imprimantes supportées
Première grosse différence entre les deux logiciels : là où Fiery eXpress peut piloter une quantité impressionnante d’imprimantes (télécharger la liste ici), Mirage ne peut piloter que des imprimantes de marque Canon ou Epson. Et encore : la version que vous choisirez ne pilotera que l’une OU l’autre de ces deux marques (à moins d’acheter une licence supplémentaire pour pouvoir piloter les deux marques en même temps, ce qui représente un surcoût conséquent).
Fiery eXpress hérite des nombreux pilotes et du système de licence de son grand frère (Fiery XF), alors que Mirage n’a étoffé son catalogue que récemment (le RIP, à sa création, était strictement dédié aux imprimantes Epson : l’ajout des imprimantes Canon n’est apparu qu’avec cette version 3).
Pour l’un comme pour l’autre de ces RIP, n’espérez pas piloter de petites imprimantes. Ce logiciels sont destinés aux utilisateurs d’imprimantes de grand format (feuilles A2 / rouleau 17 pouces minimum).
Interface
Ici encore, les logiciels prennent des orientations assez différentes : là où Mirage fonctionne par modules et fenêtres flottantes, Fiery eXpress propose une fenêtre unique. Chacun aura son propre avis à ce sujet, mais nous avons trouvé l’interface de Mirage beaucoup plus brouillonne et lourde d’utilisation : la liste des images à imprimer est peu pratique d’usage et on se perd assez vite dans les différents menus d’options… L’écran d’accueil du logiciel est également plutôt déroutant, puisqu’il s’agit d’une boîte de dépôt dans laquelle l’utilisateur doit glisser sa ou ses image(s). La gestion de l’historique se fait via une application différente (Mirage Job Archive).
La zone d’aperçu est classique mais pratique : on appréciera particulièrement le magnétisme des bords et du centre du format, pratique pour positionner manuellement ses images.
On notera également deux fonctionnalités intéressantes : la possibilité de créer assez facilement des préréglages personnalisés, applicables à la volée sur n’importe quelle image chargée en file d’attente, ainsi que la possibilité de créer des « gouttelettes » (droplet en anglais). Ces « gouttelettes » sont de petites applications qui lancent Mirage avec les paramètres souhaités. Il n’y a plus qu’à glisser les images directement sur l’icône de la gouttelette pour les imprimer avec les paramètres préalablement configurés.
Mirage propose aussi, en option payante, l’ajout de plugins d’impression directement depuis les principaux logiciels Adobe (Lightroom, Photoshop, InDesign, Illustrator…). Un petit plus que certains apprécieront.
Chez EFI, la gestion des travaux d’impression est beaucoup plus classique : le logiciel est partagé en trois espaces principaux : la zone d’historique (avec les images déjà imprimées ou en file d’attente), la zone d’aperçu (dans laquelle l’utilisateur peut facilement effectuer manuellement des opérations de redimensionnement, de placement ou de recadrage) et la zone d’options (mise en page, gestion des couleurs, format de sortie…).
Il existe aussi un mécanisme de préréglages, moins flexible que chez Mirage cependant : il faut sélectionner le réglage souhaité AVANT de charger l’image en file d’attente.
Fiery eXpress permet la mise en place d’un dossier actif (hotfolder) qui est automatiquement scruté par le logiciel : il suffit d’y déposer les fichiers pour qu’ils soient traités et imprimés selon le paramètre sélectionné dans le RIP. Ce mécanisme est particulièrement pratique pour l’impression à distance, puisque ce dossier peut être partagé sur le réseau (et donc être accessible depuis n’importe quel poste distant).
Il est aussi possible de créer un imprimante virtuelle, qui peut elle aussi être publiée sur un réseau. Il devient alors enfantin d’imprimer depuis n’importe quel logiciel, sans nécessité d’installer le moindre plugin ou la moindre application supplémentaire.
Dans le logiciel lui-même, l’ajout d’un job d’impression se fait par simple glisser/déposer dans la zone d’historique.
Mise en page
Les options de mise en page sont nombreuses et plutôt complètes sur les deux logiciels : mise à l’échelle automatique ou personnalisée (en taille physique ou en pourcentage), rotation automatique, ajout de marges, alignement, rognage de l’image… Il n’existe pas de différence notable entre les deux RIP pour ces fonctions basiques mais essentielles. La mise en page des travaux d’impression est visible en temps réel dans la fenêtre de prévisualisation et nous n’avons pas réussi à la prendre en défaut, quel que soit le logiciel utilisé : le résultat imprimé est toujours conforme à l’aperçu.
Mirage est un peu plus complet, permettant par exemple de générer des marges colorées ou en miroir (pour l’assemblage sur un cadre), mais les applications de ces options supplémentaires restent limitées.
Imbrication
Ici, chaque RIP a adopté sa propre logique.
Mirage considère que toutes les images chargées dans sa fenêtre de documents font, d’office, partie d’une imbrication et sont donc, à ce titre, positionnées sur un seul et même job d’impression. Il est alors possible d’optimiser le placement et/ou la mise à l’échelle en fonction des besoins. L’impression d’une seule image par ligne/feuille est l’un des différents préréglages disponibles pour la gestion de ces imbrications.
Sur Fiery eXpress, c’est l’inverse : chaque image est d’abord traitée comme un job d’impression indépendant. Créer une imbrication est donc une action volontaire de l’utilisateur (soit manuellement soit via un réglage prédéfini). Une fois cette imbrication (intitulée « collection » chez EFI) créée, il est également possible de l’optimiser selon ses besoins (optimisation pour une découpe horizontale, pour maximiser l’utilisation du papier, pour créer une planche contact…).
Malgré son interface plus austère, Mirage prend ici l’avantage sur Fiery eXpress, notamment pour la gestion d’images dont l’orientation est différente (portrait/paysage) : sur le même ensemble d’images, Mirage s’est révélé plus flexible et plus ‘ »intelligent » dans l’uniformisation de la taille et du placement des images.
Gestion des couleurs
Installation des profils ICC
Mirage comme Fiery eXpress disposent d’un bibliothèque de profils ICC, installée avec le logiciel. Pour les utilisateurs peu exigeants ou pour ceux qui veulent effectuer des tests sur certains supports, ces profils seront très utiles.
Pour les autres, en revanche, ces profils ne seront pas suffisants : il auront besoin de pouvoir importer leurs propres profils ICC, voire d’avoir la possibilité de les créer eux-mêmes.
Pour l’importation de profils personnalisés, Mirage et Fiery eXpress proposent chacun une solution pratique et efficace. Pour Mirage, il faut passer par les paramètres du logiciel, qui liste tous les profils installés et permet d’en ajouter facilement de nouveaux. Pour Fiery eXpress, il faut passer par un petit module externe (RGB Profile Connector). Le résultat est identique : l’installation de profils externes au RIP, standards ou personnalisés, est très simple et efficace.
Utilisation des profils ICC
Pouvoir installer des profils ICC personnalisés, c’est bien. Mais pouvoir les utiliser, c’est encore mieux ! Là encore, la sélection du profil de sortie est très aisée quel que soit le logiciel.
Sur Mirage, on sélectionne un type papier, qui nous liste tous les calibrages disponibles. C’est plutôt bien vu, puisque cette démarche force l’utilisateur à regrouper ses médias sous la bonne famille.
Sur Fiery eXpress, le nom du média d’impression est laissé libre, indépendamment de la famille papier à laquelle il appartient. Si cela permet une plus grande liberté dans l’organisation des papiers, la liste peut vite devenir une véritable jungle si l’utilisateur n’est pas suffisamment rigoureux.
Gestion des couleurs
La gestion des couleurs est beaucoup plus complète sous Fiery eXpress, ce dernier héritant des nombreuses options de son grand frère, le Fiery XF : il est ainsi possible de déterminer si le RIP doit utiliser les profils intégrés aux documents (si disponibles) ou s’il doit systématiquement convertir les images dans un profil spécifique. Le choix des intentions de rendu est également très complet, puisqu’il propose les intentions de rendu habituelles (perceptuel / saturation / relatif – avec ou sans compensation du point noir / absolu), auxquelles EFI a rajouté des intentions de rendu « maison » : perceptuel absolu, absolu avec compensation du point noir. Il est également possible de forcer l’impression en niveaux de gris en d’en régler la teinte (du gris « chaud » au gris « froid »).
Sur Mirage, on accède à beaucoup moins d’options : le RIP se contente de proposer une impression couleur ou noir et blanc (cette dernière n’étant disponible qu’avec les imprimantes Epson et sur certains papiers, via la fonction du même nom proposée dans les pilotes des imprimantes de la gamme Stylus Pro). Les intentions de rendu disponibles sont limitées, puisque la compensation du point noir n’est apparemment pas proposée (malgré l’installation d’Adobe CMM avec le RIP).
A noter : les deux RIP permettent d’imprimer sans aucune gestion des couleurs (pour les chartes de caractérisation).
Création de profils ICC
Avec Fiery eXpress, impossible de créer ses propres profils ICC : l’option n’est tout simplement pas implémentée.
Avec Mirage, en revanche, il s’agit d’une option payante. La procédure est automatisée, puisqu’elle fonctionne avec les spectrophotomètres intégrés (SpectroProofer chez Epson et SU-21 chez Canon). Elle n’est donc accessible qu’aux possesseurs d’imprimantes qui peuvent être équipées de ce type d’instrument. N’ayant pas d’imprimante équipée à disposition, nous n’avons malheureusement pas pu tester cette fonctionnalité. Nous nous permettrons cependant une critique évidente : étant donné le prix des spectrophotomètres intégrés, il nous semble aberrant de faire un tel investissement pour une utilisation aussi restreinte. Pour un prix équivalent (voire moindre), investir dans une solution plus polyvalente (telle que les solutions X-Rite ou basICColor) nous semble beaucoup plus intéressant.
Epreuvage
Par défaut, le Fiery eXpress (lancé en mode « Proofing ») permet d’imprimer d’une gamme de contrôle à côté de chaque image et d’adopter la gestion des couleurs (le profil de simulation) adéquate. Seule la version « Proofing Advanced » intègre un module de vérification des gammes de contrôle via un appareil externe (type X-Rite i1 Pro 2).
Le moteur couleur est très efficace : pour peu que le profil ICC de sortie soit réalisé avec soin, produire des épreuves contractuelles est d’une grande simplicité. Le module de contrôle permet alors de s’assurer que les épreuves imprimées sont conformes aux tolérances admises et, au besoin, d’imprimer l’étiquette de rapport qui l’atteste. Une fonction d’optimisation permet même de réimprimer correctement une image qui n’aurait pas pas passé la validation (à utiliser avec précaution cependant).
Sur Mirage, en revanche, la production d’épreuves semble beaucoup plus obscure : elle n’est disponible qu’avec les imprimantes Epson sur certains supports prédéfinis. Impossible de sortir des épreuves sur son propre papier d’épreuvage (même si on dispose d’un profil ICC personnalisé) !
Le module de mesure (qui n’est autre qu’une version labellisée « Mirage » de basICColor Catch) est simple et efficace.
On sent ici clairement que Mirage n’est pas un RIP d’épreuvage. Avant tout dédié à la production et à l’impression photographique, on peut supposer que Dinax a rajouté un peu rapidement cette option « Proof ».
Fiery eXpress, lui, hérite une fois de plus de toute l’expérience d’EFI en matière de production pré-presse. Pour peu que l’on maîtrise un minimum son sujet (ou que l’on fasse appel à un prestataire), produire des épreuves contractuelles avec Fiery eXpress sera bien plus facile qu’avec Mirage.
Prix
Les tarifs des deux solutions sont plutôt similaires (à quelques euros près), pour peu que l’on soit prêt à se limiter à une marque d’imprimantes (ce qui, pour Mirage, est obligatoire).
Ainsi, à titre d’exemple, le Fiery eXpress for Photo Canon (permettant de piloter n’importe quelle imprimante Canon de la gamme iPF) est proposé 480€ TTC, quand Mirage Master Edition for Canon Single License (permettant lui aussi de piloter n’importe quelle imprimante Canon de la gamme iPF) sera proposé à 474,81€ TTC. Seul EFI propose son logiciel dans une version indépendante la marque de l’imprimante pilotée. Sans différence pour les imprimantes 17 pouces (licence M), le tarif devient plus intéressant lorsqu’il s’agit de piloter des imprimantes de plus grande taille (licences XL et XXL).
Les tarifs de Mirage sont disponibles à cette adresse : http://mirage.dinax.de/shop-new.html
Les tarifs de Fiery eXpress sont accessibles sur simple demande. N’hésitez pas à nous contacter.
Conclusion
Sans graves lacunes ou dysfonctionnements, force est de reconnaître que Mirage reste un petit cran en-dessous de son concurrent Fiery eXpress. Beaucoup d’efforts ont été déployés par Dinax pour offrir à ses utilisateurs le plus de fonctionnalités possible, mais on sent qu’il s’agit plus d’une adjonction de modules que d’un développement cohérent et homogène.
Fiery eXpress bénéficie de la très longue expérience d’EFI dans le domaine du RIP de production et d’épreuvage et, sans être fondamentalement supérieur à Mirage, il donne une impression de robustesse et d’ergonomie que son concurrent peine encore à procurer.
Sans déconseiller Mirage, qui est un bon produit, nous orienterons donc plutôt vers Fiery eXpress les clients désireux d’investir dans un RIP pour leur production RVB ou CMJN.